
Ce petit arbre (Lawsonia inermis) a parcouru de longs chemins avant d’arriver jusqu’à nous. Dans les pas des conquêtes arabes, il s’est imposé dans nombre de pays où on le cultive pour fabriquer de l’encre à tatouage ou nombre de produits colorants.
D’où vient le henné ?
Il pousse en Afrique du Nord, au Proche-Orient, en Iran. Puis les conquêtes arabes et l’expansion de l’islam l’ont emporté au Soudan, mais aussi en Inde, en Indonésie jusqu’au sultanat de Brunei. On le cultive aussi au Sénégal, au Tchad. Son origine exacte n’est pas connue. L’Iran est cité bien souvent, mais l’hypothèse d’une origine de l’Inde du Nord n’est pas exclue.

Épineux ou pas ?
Inermis en latin signifie « dépourvu » d’épines, ce qui correspond à la description d’un arbre jeune. Car, quand il prend de l’âge, le henné s’affuble aussi d’épines…
Le henné dans l’Antiquité
Une certitude : le henné est utilisé dans la région de Sumer, la partie méridionale de l’ancienne Mésopotamie (aujourd’hui l’Irak et le Koweït). Idem pendant l’hégémonie du royaume de Babylone. À cette période (3000 – 1500 av. J.-C.) Les hommes se teignent alors le visage et la paume des mains et l’on suppose que la teinture est également utilisée par les femmes sur les mains et les ongles lors des mariages. À l’époque, la teinture n’est pas appliquée sur les cheveux ou la barbe, car on lui préfère le… bitume pour sa couleur noire.
C’est aussi le bitume qui a encore les faveurs des Égyptiens, même si la momie de Ramsès II présente des mains et des pieds rougis au pouker (nom donné au henné par les Égyptiens). Le henné arrive alors, via les bateaux ou les caravanes, sous forme de poudre. Lawsonia inermis sera planté plus tard dans le delta du Nil où les conditions sont favorables à sa culture.
Chez les Hébreux, on connaît aussi le henné. Mais on en parle plus pour son parfum que pour une quelconque utilisation, tout comme les Grecs et les Romains.

Le henné dans le monde islamique
La plante a accompagné ou suivi les conquêtes arabes et les voyages des marchands. On note la présence d’Arabes dès le VIIIe dans des provinces méridionales de la Chine et l’utilisation du henné en teinture ou pour soigner des blessures. Lawsonia inermis est également présent au Viêt-nam, au Cambodge. Dans ce dernier pays, le henné est arrivé via les relations commerciales, car les Arabes venaient acheter du bois, comme l’atteste un récit du diplomate chinois Zhou Daguan au XIIIe. On se teint alors les ongles, les paumes, comme chez les nouveaux mariés en Malaisie. En Indonésie, son usage est quasi généralisé.
En Espagne et en Afrique du Nord…
L’arrivée du Lawsonia inermis remonte sans doute au VIIIe quand, en 711, une armée arabe débarque à Gibraltar, met fin à la suprématie wisigothe et instaure Al Andalus puis l’émirat autonome de Cordoue. La culture du henné s’installe, mais elle n’est vraiment pas facile, le climat ne lui étant pas totalement favorable. La solution ? Planter des graines chaque année.
Dans son livre « Les voyages du Henné », Françoise Aubalie-Sallenave rapporte une observation du botanique René Desfontaines, de retour d’Afrique du Nord : « Dans plusieurs cantons, les femmes se sont particulièrement réservé les soins du henné : après en avoir fait tremper la graine dans l’eau pendant trois oui quatre jours, elles la mettent dans un sac de toile et lorsqu’elle a perdu une partie de son humidité, elles l’enveloppent dans une ceinture de laine, et la portent autour de leur corps jusqu’au moment où le germe commence à pousser : alors elles la sèment sur une terre finement divisée, dans des lieux humides et ombragés. »

Comment fabrique-t-on le henné ?
Il est obtenu grâce aux feuilles, aux racines ou à l’écorce de Lawsonia inermis, réduites en poudre.
Attention aux tatouages !
Il faut absolument s’assurer que le tatouage permanent est réalisé à partir de henné naturel. Il existe en effet des hennés synthétiques qui peuvent se révéler très dangereux (ils sont souvent de couleur noire) en raison de risques graves d’allergie. Les tatouages temporaires au henné naturel ne présentent pas de risque, contrairement là encore au henné de synthèse.
Les tatouages, les teintures au henné naturel sont à réserver exclusivement aux adultes. Chaque année, des bébés souffrent d’hémolyse aigüe après application de henné sur la peau après leur naissance.
Source : « Les voyages du henné », de Françoise Aubalie-Sallenave, parution 1982, in « Journal d’agriculture traditionnelle et de botanique appliquée »
Source : https://magazine.hortus-focus.fr/