
Et si les abeilles avaient du plomb dans l’aile ? Une étude récente alerte sur l’impact de la pollution des sols sur leur santé.
Des ruches installées sur des toits d’immeubles, des friches industrielles transformées en espaces d’apiculture… La ville est devenue, ces dernières années et non sans conséquences, le terrain de jeu des abeilles et autres pollinisateurs ; menacés par l’activité de l’homme et le dérèglement climatique.
Une étude britannique inédite, parue le 15 avril dans la revue scientifique Ecology and Evolution, tire la sonnette d’alarme : les fleurs sauvages, une des sources de nourriture préférées des butineurs, peuvent absorber une quantité importante des métaux présents dans les sols des villes, et ainsi mettre ces insectes en danger.
Pollen, nectar et métaux lourds
Certaines plantes sauvages, comme le trèfle blanc, le liseron ou la carotte sauvage, passent parfois inaperçues. Elles poussent pourtant un peu partout en milieu urbain et sont fortement convoitées par les abeilles, qui viennent leur soutirer du pollen et du nectar, la matière première du miel. Sous leurs racines, les sols sont souvent contaminés par la présence très concentrée de métaux lourds, comme le chrome ou l’arsenic, résidus de l’activité humaine et du passé industriel des villes.
Les scientifiques se sont penchés sur le cas de Cleveland, aux États-Unis, autrefois centre de production de fer et d’acier. Il leur est apparu clairement que le nectar des plantes sauvages qu’ils y ont récolté contient des traces sensibles de toxines comme le plomb, en quantité pouvant atteindre 0,5 mg/L.
Ce taux n’a, sur le papier, rien d’alarmant. Néanmoins, les pollinisateurs ont la capacité d’absorber et de concentrer une substance chimique au sein de leur organisme, sans parvenir à l’éliminer rapidement. Cette propriété, appelée « bioaccumulation », les rend particulièrement vulnérables face à une contamination. En butinant les fleurs sauvages quotidiennement, les insectes augmentent la quantité de métaux lourds présente dans leur corps, la dose pouvant devenir létale.
Soigner les sols : un remède pour la santé des abeilles
Les effets sur les pollinisateurs pourraient être nombreux en cas d’exposition prolongée aux métaux lourds : altération de leurs capacités de vol, retard dans la ponte des reines ou impact sur leur capacité de mémoire et d’apprentissage. Cela pourrait même conduire, à terme, à une réduction significative de la taille des populations d’abeilles, dont les répercussions se feraient ressentir à toutes les échelles de la chaîne alimentaire. Selon Greenpeace, 75% de la production mondiale de nourriture dépend des insectes pollinisateurs.
Les scientifiques britanniques à la tête de l’étude insistent donc sur l’importance cruciale de protéger ces espèces, non pas en décourageant les apiculteurs, professionnels comme amateurs, de planter des fleurs sauvages en ville pour les abeilles, mais bien en les invitant à considérer que la santé des sols est déterminante pour celle des pollinisateurs. Des tests visant à détecter une potentielle contamination des sols aux métaux lourds pourraient, par exemple, être réalisés plus fréquemment avant toute plantation.
Source : https://www.geo.fr/