
L’expertise de l’INRAE-Ifremer présentée jeudi 5 mai 2022 alarme sur l’incidence des produits phytosanitaires sur la biodiversité et l’écosystème. Jusqu’où s’étendent les dégâts ? Sommes-nous capables de les réparer ?
Entre 55 000 et 70 000 tonnes. C’est la quantité de produits phytosanitaires vendus et déversés sur les végétaux en France. C’est ce que nous apprend l’expertise de l’INRAE-Ifremer présentée jeudi dernier. Dans quelle mesure notre écosystème est-il atteint par les produits phytosanitaires ? Et sommes-nous capables de réparer les dégâts causés ?
Guillaume Erner reçoit Stephane Pesce, directeur de recherche en écotoxicologie microbienne au sein de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE).
Les produits phytopharmaceutiques
« Les produits phytopharmaceutiques sont des produits utilisés pour contribuer à la bonne santé des cultures« . Stephane Pesce distingue deux types d’usages : les usages agricoles et les usages non agricoles des particuliers interdits depuis la loi Labbé.
L’expertise l’INRAE-Ifremer a été mandatée par trois ministères, le ministère de la transition énergétique, le ministère en charge de l’agriculture et de l’alimentation et le ministère en charge de la recherche pour établir un état des lieux des connaissances de la littérature scientifique pour comprendre la contamination des écosystèmes par les produits phytopharmaceutiques et les effets qui en découlent sur la biodiversité. 46 experts-chercheurs ont été mobilisés et plus de 4000 articles ont été analysés.
La rémanence des produits phytopharmaceutiques
« On s’est intéressé à la contamination depuis la source, des milieux agricoles jusqu’aux milieux marins. Les zones les plus contaminées sont situées en milieu agricoles, avec à la fois une contamination du milieu terrestre et du milieu aquatique. Ces produits ne vont cependant pas rester à l’endroit où ils ont été utilisés ». La pollution dite diffuse se retrouve très loin des zones d’utilisation des produits. « On retrouve des traces de substances interdites depuis des dizaines d’années dans les fonds marins par exemple », explique Stephane Pesce.
La rémanence est une question importante avec ces produits. Les produits les plus rémanents sont cependant interdits depuis plusieurs années et les substances actuellement utilisées restent théoriquement moins longtemps dans l’environnement.
La gestion des paysages
« Il apparait clairement dans les zones les plus contaminées, les zones agricoles, que les produits phytopharmaceutiques ont un impact sur la biodiversité de certaines populations ». Ce ne sont cependant pas les seules causes du déclin de la biodiversité (changement climatique, surexploitation des espèces…), estime Stephane Pesce.
Un élément très important à prendre en considération pour permettre la récupération des écosystèmes est la gestion des paysages. « Il est important de maintenir des zones épargnées par la contamination, qui servent de zones tampons pour limiter la propagation des contaminants, et qui permettent aux organismes de s’y réfugier ». Ces zones sont des réservoirs d’espèces qui peuvent recoloniser les milieux quand la qualité des milieux voisins s’améliore.
Source : https://www.radiofrance.fr/