Pourquoi les États-Unis ont-ils interdit un colorant alimentaire utilisé pour colorer en rouge cerise tous les produits, des cupcakes aux slushies à la fraise ?
Le rouge n° 3 (Red No.3) est un colorant alimentaire artificiel qui, comme tous les autres colorants synthétiques, est fabriqué à partir d’un groupe de produits chimiques issus du pétrole. On le trouve dans des milliers de produits alimentaires, les États-Unis recensant plus de 3 000 articles contenant de petites quantités de ce colorant.
Les entreprises alimentaires ajoutent des colorants à des aliments tels que les desserts, les bonbons ou même le sirop pour la toux dans le seul but de les rendre visuellement plus attrayants, en particulier pour les enfants. Ils peuvent également empêcher une perte de couleur due à des conditions environnementales telles que la chaleur. Ces colorants peuvent être fabriqués à partir de substances alimentaires synthétiques ou naturelles, et certains sont utilisés dans le commerce depuis plus de 100 ans.
L’érythrosine, le colorant FD&C Red No. 3 ou Red 3, a été autorisé pour la première fois dans les aliments aux États-Unis en 1969. L’interdiction de janvier la retire de la liste américaine des additifs autorisés dans les aliments, les compléments alimentaires tels que les vitamines et les médicaments oraux tels que les sirops contre la toux.
L’utilisation du rouge n° 3 dans les produits cosmétiques – tels que les rouges à lèvres et les lotions appliquées sur la peau – a été interdite aux États-Unis il y a plus de trente ans. Cette interdiction faisait suite à une étude portant sur des rats mâles qui avaient développé des tumeurs de la thyroïde après avoir été exposés à des niveaux élevés de colorant rouge 3 dans le cadre d’études en laboratoire. Mais selon la Food & Drug Administration (FDA), les rats ont développé un cancer par un mécanisme hormonal qui n’existe pas chez l’homme – et les études sur l’homme et d’autres animaux n’ont pas montré d’effets similaires, ce qui explique que le colorant ait été retiré.
Où le Rouge No.3 est-il interdit ?
La Nouvelle-Zélande, l’Australie, le Japon, le Royaume-Uni et de nombreux pays de l’Union européenne ont interdit ou fortement limité l’utilisation du rouge n° 3 dans la plupart des aliments il y a plusieurs années.
En 2023, la Californie a pris sa propre position et est devenue le premier État américain à l’interdire, bien que cette interdiction n’entre en vigueur qu’en 2027.
Chaque pays dispose de son propre organisme de réglementation alimentaire. Cela signifie qu’un colorant interdit dans un pays peut être considéré comme sûr dans un autre en raison de préoccupations sanitaires différentes ou de l’analyse des preuves scientifiques disponibles. L’une des critiques formulées à l’encontre des études sur les colorants alimentaires est qu’elles ont utilisé des échantillons de petite taille.
Le Rouge No.3 est-il nocif ?
Les experts en santé ont exprimé leur inquiétude car les colorants ajoutés aux aliments ont été associés à de nombreux problèmes de santé, allant des réactions allergiques à l’hyperactivité chez les enfants. Les colorants pourraient même être cancérigènes, même si certains affirment que, dans le cas de l’étude sur les rats, les humains ne consommeraient jamais le colorant en quantités suffisantes pour provoquer un cancer.
Il existe de plus en plus de preuves établissant un lien entre les colorants alimentaires et les troubles du comportement chez les enfants. Des études suggèrent que certains colorants, dont le rouge n° 3, peuvent rendre les jeunes enfants et les adolescents hyperactifs, irritables, inattentifs ou de mauvaise humeur.
Une étude réalisée en 2007 par des chercheurs de l’université de Southampton, au Royaume-Uni, a révélé une augmentation des niveaux d’hyperactivité chez les jeunes enfants consommant des mélanges de certains colorants alimentaires artificiels et du benzoate de sodium, un agent de conservation.
Des inquiétudes similaires ont été exprimées au sujet de six autres colorants alimentaires synthétiques, dont le jaune n° 5, également connu sous le nom de tartrazine, qui a été associé à l’irritabilité, à l’agitation et à la dépression chez certains enfants. Des études menées sur des animaux ont montré que plusieurs colorants alimentaires synthétiques peuvent également affecter la mémoire et l’apprentissage.
Les colorants ne sont pas le seul risque : les additifs alimentaires, tels que les conservateurs et les exhausteurs de goût souvent utilisés avec les colorants, peuvent également poser des problèmes de santé s’ils sont consommés en grandes quantités ou par des personnes présentant des sensibilités spécifiques.
Les colorants alimentaires artificiels, les conservateurs et les arômes sont plus souvent présents dans les aliments ultra-transformés bon marché. Les recherches soulignent que les familles à faible revenu sont beaucoup plus exposées à ces aliments. Il s’agit notamment d’en-cas et de boissons sucrés qui sont brillants, colorés et délibérément conçus pour attirer les enfants – ils sont largement disponibles et abordables.
Que pouvez-vous faire si le Rouge No.3 n’est pas interdit dans votre pays ?
Comment savoir si votre nourriture contient du rouge n° 3 ? Si elle est rouge cerise vif, c’est le premier indice, car elle peut même tacher vos dents.
Vérifiez l’étiquette : minimisez votre risque en lisant attentivement les étiquettes des ingrédients au dos des emballages alimentaires.
Le principal conseil des experts en santé est de privilégier autant que possible les aliments d’origine végétale – fruits et légumes, haricots et céréales complètes. Cuisiner davantage de repas à la maison est également utile, car cela permet d’éviter d’utiliser des produits complexes qui peuvent contenir des colorants ou des conservateurs cachés. Les experts recommandent vivement de limiter la quantité d’aliments ultra-transformés consommés par les enfants, peut-être en les réservant à des occasions spéciales telles que les fêtes d’anniversaire.
La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des alternatives naturelles. Les colorants alimentaires peuvent provenir de sources naturelles comme les fruits et les légumes. Les couleurs vertes peuvent provenir des pigments de la chlorophylle que l’on trouve dans les tiges et les feuilles des plantes.
Les épices, comme le paprika et le curcuma, sont souvent utilisées pour remplacer les colorants alimentaires synthétiques, même dans les produits de restauration rapide comme les cheeseburgers.
Certains fabricants américains de produits alimentaires affirment avoir déjà modifié leurs produits pour supprimer le rouge 3 et le remplacer par du jus de betterave, du carmin (un colorant fabriqué à partir d’insectes) et des pigments provenant de légumes tels que la patate douce violette, le radis et le chou rouge.
Cela dit, certains fabricants américains viennent de remplacer le rouge 3 par le rouge 40, un échange pur et simple – ce colorant n’est pas totalement interdit dans l’Union européenne, mais il fait l’objet de restrictions.
Les groupes de pression souhaitent que les gouvernements et les autorités de réglementation aillent encore plus loin en apposant des étiquettes d’avertissement sur les aliments contenant des colorants synthétiques, en particulier ceux destinés aux enfants.
Source : https://www.bbc.com/